Martillac, "du visible à l'introuvable"

 

*" Cultures et traditions locales : du visible à l'introuvable" :

par Anne Marie et Jean Claude Caron ; 1996 ;

 

téléchargez texte Martillac

 

ci-dessus, photos de château Smith Haut Lafitte, mairie en centre bourg, église, muguet (Martillac 2° ville de France productrice de muguet), Technopole (architecte Petuaud Letang)

MARTILLAC - Sup. 1909 hectares - Altitude 45 m - Population 2020 habitants recensés en 1999.

L'origine romaine du nom de MARTILLAC ne semble pas faire de doute mais deux traditions au moins s'affrontent, la première veut qu'il s'agisse d'une dérivation du nom d'un général romain nommé marcius, l'autre aussi met en scène un général romain (le même ?) mais se trouve être plus romanesque. Voici la légende : pendant les guerres de conquêtes des Gaules, sous Jules César, un général romain s'avance sur une terre marécageuse, mouvante, il est en grand danger d'enlisement quand soudain le sol se raffermit inexplicablement sous les sabots de son cheval. Ceci fut reconnu comme un miracle et un temple fut, bien sûr, élevé en l'honneur de la divinité responsable de ce prodige, le dieu MARS en l'occurrence, dieu de la guerre protégeant son guerrier. En langage du pays mars dériva en marti ce qui donna martillac qui serait donc le lieu où l'on vénéra le dieu mars. Il est d'ailleurs tout à fait probable qu'un temple romain se soit dressé dans les environs de Martillac.

Peu de vestiges anciens sont visibles à Martillac, l'ancienne route romaine est aujourd'hui la route qui mène à Saucats non loin de là se trouve un pont en pierre fort vieux qui est communément appelé "Pont Romain" mais son origine romaine n'est pas prouvée, il doit surtout son nom à sa situation à proximité de la voie romaine. Une des Bornes jalonnant le chemin de Compostelle est signalée sur la carte I.G.N. au croisement des routes de Léognan et de Saucats (voie romaine) à gauche en allant vers Saucats. Si elle existe toujours à cet endroit nous avons été incapables de la découvrir, à notre grand regret.

Le blason de la ville a été déposé en 1989 à la préfecture de Bordeaux. Ce blason est divisé en quatre quartiers, sur le premier quartier est représenté une croix de Jérusalem rouge ("de gueules") sur fond bleu ("d'azur"), sur le deuxième quartier une tour d'argent sur fond rouge "posée sur une terrasse d'or", le troisième quartier porte un château d'argent sur fond rouge avec une grappe de raisin d'or "posée en pal au milieu du chef", le quatrième quartier est "d'azur au chêne arraché d'argent, accosté de deux fleurs de muguet aussi d'argent, à dextre et senestre du tronc." Muguet et vigne représentent les deux principales richesses de Martillac quant aux bois de chênes ils étaient, et sont encore, nombreux dans les environs.

Les châteaux sont nombreux, ce sont essentiellement des petites propriétés viticoles dont très peu dépassent la cinquantaine d'hectares, les vins ont l'appellation "pessac-léognan".

Le plus petit de ces vignobles semble être le Château MIREBEAU, cinq hectares seulement mais deux titres de gloire, le premier est qu'il s'agit d'une des plus anciennes propriétés de Martillac, le second titre dont il peut s'enorgueillir est qu'il fut la propriété d'une des petites-filles d'Alexandre DUMAS.

Les sept hectares du Château LESPAULT entourent un très joli manoir du XVIIIesiècle. Le vignoble est géré aujourd'hui par une société fermière.

Le vignoble du Domaine de MALLEPRAT revient de loin, abandonné, en friche, il fut racheté il y a une quarantaine d'année par son propriétaire actuel qui réussit à le sauver du désastre. Bien que n'ayant pas l'appellation "château", il s'agit d'un très bon terroir.

Le Château FERRAN compte environ 13 hectares, le domaine possède des chênes et des pins maritimes magnifiques, la demeure est bâtie sur des terres qui appartenaient autrefois à Lartigue qui fut un temps dans la famille de Montesquieu. Il est possible d'en visiter les chais mais l'été seulement et après avoir pris rendez-vous.

Parmi les propriétés d'une dizaine d'hectares nous citerons encore le Château LAFARGUE, dix-huit hectares, il s'agit là d'une exploitation familiale traditionnelle qui se trouve être en pleine expansion.

Le Château LA-TOUR-MARTILLAC est un ancien domaine ayant appartenu à la famille de Lartigue. La tour à laquelle il doit son nom est ce qui reste d'un ancien fortin du XIIe siècle qui faisait partie des défenses avancées du Château de La Brède. C'est une tour ronde au toit pointu qui se dresse isolée au milieu de la cour d'honneur. Le vignoble s'étend sur une superficie de 32 hectares, il est la propriété de la famille Kressmann depuis 1871.

Le château LAGARDE possède 48 hectares, la maison a été remaniée mais le corps de logis principal date de 1739 et se présente comme une charmante gentilhommière au toit d'ardoise.

Le Château HAUT-NOUCHET a la particularité d'avoir appartenu à M. Marcel Vayssiere, ancien sénateur et maire de Martillac, conseiller général du canton de La Brède dont le buste en bronze orne depuis 1926 la place principale de sa commune. Mais un vandale est passé par là et la plaque commémorative a été volée ! Pour le touriste moyen cet illustre personnage devient donc hélas un illustre inconnu. Martillac possède beaucoup de petites propriétés viticoles de quelques dizaines d'hectares de superficie, nous allons nous intéresser à quelques unes des plus grandes d'entre elles.

Le vignoble du Château SMITH HAUT LAFFITE s'étend sur 55 hectares et il est connu depuis au moins le XVIe siècle. Haut Laffite peut se traduire par Haute-Butte en vieux bordelais, parmi ses anciens propriétaires nous relevons un nom très connu, celui de M. Dufour-Dubergier qui fut maire de Bordeaux pendant deux décennies.

Le Domaine de LARTIGUE fut exploité autrefois par Montesquieu, en réalité il était la propriété personnelle de Madame de Montesquieu, la famille de Lartigue possédait également le château La Tour-Martillac ainsi que les terres sur lesquelles s'élève le château Ferran. Lartigue se situe à environ 1Km du bourg de Martillac, sur la gauche si l'on suit la petite route qui relie le village à la N.113. La maison de style XVIIIe se dresse au milieu d'un parc à deux entrées, si une de ces entrées est récente on peut admirer le portail en fer forgé du XVIIe siècle de la seconde. Dans ce parc se trouve un tilleul sous lequel, si l'on en croit la tradition, Montesquieu aimait venir se reposer ou méditer.

Enfin il est encore un autre domaine où plane l'ombre de notre grand écrivain, c'est le Domaine de ROCHEMORIN. Son origine est très ancienne, ce domaine a longtemps été appelé La Roche Morine car c'est sans doute vers le VIIIe siècle que les sarrasins ont construit une forteresse qui appartint ensuite au XIVe siècle à la famille de La Lande. Il reste encore une ferme datant vraisemblablement de cette époque, elle est fortifiée et possède des murs à créneaux, les encadrements de portes et fenêtres sont du XVIIe et le portail de fer forgé du XVIIIe siècle. Le vignoble de 83 hectares qu'avait exploité autrefois Montesquieu avait totalement disparu, son nouveau propriétaire depuis 1973 est en train de le reconstituer tout en restaurant la maison.

Il est dans Martillac un autre domaine viticole de 25 hectares, implanté dans une clairière de pins, il s'agit du Domaine de La Solitude. Il ne s'agit pas uniquement d'une exploitation agricole mais d'un institut séculier qui abrite la Congrégation de la Sainte Famille, à vocation Contemplative et Apostolique. Cette Congrégation fut fondée par le père Bienvenu NOAILLES en 1820, à Bordeaux. L'association acheta en 1831 une propriété à Martillac qui était un ancien Rendez-Vous de Chasse de Montesquieu devenu orphelinat. une des toutes premières activités des religieuses fut, outre les secours aux pauvres et aux malades, l'enseignement des enfants. La Solitude est un lieu calme propice à la méditation et à la prière, dans le parc on trouve la fontaine Notre-Dame, un ruisseau "Le Martillac" où s'ébattent des cygnes ou encore un vieux chêne vermoulu servant d'abri à une statuette du Christ portant l'Agneau sur ses épaules. Le père fondateur est décédé en 1861 et enterré dans la chapelle, un petit cimetière réservé aux soeurs se trouve sur le domaine. Pour l'anecdote, signalons que c'est le père NoailleS qui fut un des créateurs, à la demande de l'archevêque Mgr D'Aviau, de la Société des "Bons Livres", il en rédigea les statuts et en ouvrit la première librairie. La Solitude aujourd'hui accueille des personnes seules ou en groupe ainsi que des enfants ou des jeunes qui désirent faire retraite un jour ou une semaine.

L'EGLISE de Martillac est en bon état, ce qui est assez rare dans notre canton pour être signalé. De l'église ancienne il reste le choeur pur roman et classé, les chapiteaux de l'extérieur sont remarquables par leurs ciselures et sur un des murs on distingue encore la trace d'un ancien blason, hélas illisible. Cette église a été en partie reconstruite au XIXe siècle, le clocher néogothique a été construit en 1880, commencé le 21 juillet la dernière pierre de la flèche a été posée le 31 octobre alors qu'Eugène Cornette de Venancourt était maire et Pierre Gerau curé. Une plaque apposée dans l'église honore la mémoire de bienfaiteurs, en 1877 madame Veuve Calmet et en 1899 M. Geraud. Nous ignorons la date de fondation de cette église mais elle est certainement ancienne puisqu'une tradition veut que le sieur de La Lande y ait eu sa place réservée. Avant la Révolution l'église était dédiée à Sainte Quitterie, Vierge d'Aquitaine considérée comme la Sainte patronne de Martillac depuis elle est dédiée à Notre-Dame.

L'Aqueduc de Budos, qui amène l'eau des sources de Budos à Bordeaux, traverse la commune de Martillac et lui crée une servitude. La surface constructible de la commune est assez réduite et cette servitude qui découle de la présence des "regards" de l'aqueduc réduit encore plus cette zone constructible.

Martillac aujourd'hui a quelques commerces mais peu d'artisanat (un tonnelier), ses principales ressources sont le vin et le muguet. car ce n'est pas pour rien que les blanches clochettes figurent dans son blason Martillac est en effet, après Nantes, la deuxième ville de France productrice de muguet. C'est à partir du siècle dernier qu'on a reconnu au muguet des vertus autres que médicinales, on oubliera peu à peu sa fonction de remède cardiaque pour ne retenir que sa fonction de porte-bonheur. La majeure partie de la production du muguet de Martillac échoue à Rungis, transportée par camions. La cueillette débute mi-avril, le travail est réparti entre plusieurs équipes : tri des fleurs, confection des bouquets, conditionnement etc...

Il y a de nombreuses associations, certaines sont très actives, associations sportives, tennis, club du 3e âge, pétanque, association de danse "Les Chaussons blancs", il y a aussi une société philharmonique, des associations caritatives, R.E.V.E., Trait-d'Union, etc... De nombreuses promenades à travers bois, à pied ou à VTT sont possibles.

(Les livres "Les Secondat de Montesquieu" de J.M. Eylaud et "Sur ses Pas..." de M. B. Flanagan nous ont servi de guides). A.M. et J.C. CARON

 

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