Saucats, "du visible à l'introuvable"

 

*" Cultures et traditions locales : du visible à l'introuvable" :

par Anne Marie et Jean Claude Caron ; 1996 ;

 

 

téléchargez texte Saucats

ci-dessus vue aérienne par Montuzet (Helitech), église et mairie en Centre bourg,

promenade des scolaires dans la Réserve Naturelle Géologique, dent de requin fossile et la rarissime élatine de Brochon (apparition de fleurs tous les 4 ans environ, taille 6 mm environ) ; voir aussi Flore de Gironde

 

SAUCATS a uneSuperficie de 8914 hectares, une altitude de 50 m et une population de 1655 habitants au recensement de 1999. Avec ses 8914 hectares Saucats est la plus grande commune du canton, en dehors du bourg il y a de nombreux lieux-dits groupants quatre à cinq maisons chacun : Les Quatre Poujaux, Le Treytin, Meynat, Baudes, Lassime etc..

Saucats est un pays de landes, autrefois arides et insalubres, plantées depuis le XIXème siècle en forêts de pins. Le "Saucats " prend sa source au lieu-dit Le Hos. Ce ruisseau a donné son nom au village, c’est un mot dérivé du gascon et qui veut dire "sureau". Toutefois nous avons remarqué que le souvenir de l’ancien nom du ruisseau, le "Saint-Jean d’Etampes", perdure dans le nom d’une rue du village. La population a triplé en moins de vingt ans, ce qui est sans doute un bon signe.

La forêt qui avait été détruite lors du grand incendie de 1949 a en partie repoussé mais l’exploitation forestière est aujourd’hui moins importante qu’elle ne fut. Cet incendie avait fait 82 morts dont le maire de Saucats, Monsieur Louis Roger Giraudeau. Une plaque commémorative apposée à la mairie rend hommage au courage de cet homme qui a perdu la vie en luttant contre le feu. Saucats est une des rares communes, pour ne pas dire la seule, que nous connaissions qui n’a pas de blason (note du SIGM, Saint -Morillon non plus), ce qui ne l’empêche pas d’être un ancien village dont l’occupation humaine remonte très haut dans le temps puisqu’on y a découvert des haches de l’âge du bronze.

Des tumulus, (ou tumuli)  déjà signalés au XIXème siècle par Joanne (La Gironde) existeraient toujours aux Quatre Poujaux, mais nous ne les avons pas trouvés. Des documents laissent supposer l’existence de la paroisse au VIe siècle, ici comme dans beaucoup d’autres paroisses la terrible épidémie de peste de 1348 a stoppé pendant longtemps l’expansion .

Depuis 1610 une grande Foire aux grains se tenait au mois de mars et cette foire fut un des facteurs de la relance économique de la cité. A cette époque la seigneurie de Saucats fut créée par le sieur de Fumose et le château de Saucats fut construit à cette occasion. La famille seigneuriale aux XVIIe et XVIIIe siècle, les barons de Pichard, possédait beaucoup de vignes en Médoc et Sauternais, il y avait peu de vignes à Saucats ; la principale culture du XIXe siècle fut celle de l’asperge, abandonnée de nos jours.

Le blason des seigneurs de Saucats était « De sable brisé d’azur à trois poissons appelés pichard, posés deux en pal et la troisième naissance d’une rivière du même, ondée de sinople en pointe » ; leurs biens furent saisis et vendus pendant la Révolution. Pendant l’été 1842 un trésor monétaire a été découvert, environ 900 pièces anciennes enfouies dans un vase d’argile dont 5 deniers de Louis VII, 749 deniers portant les lettres grecques alpha A et oméga w et 155 deniers dits "d’Angoulême"; ce trésor n’est plus à Saucats bien entendu.

Un homme politique important du XIXe siècle possédait une propriété à Saucats et a choisi de reposer dans son petit cimetière, il s’agit de Joseph, Henri, Joachim Lainé, né à Bordeaux en 1767. Avocat il est élu député en 1790 puis en 1814 préfet de la Gironde et Ministre de l’Intérieur de 1816 à 1818, élu académicien en 1816, passionné de littérature et ami de Lamartine, pair de France et vicomte en 1823. Légitimiste et libéral il se retire dans sa propriété familiale de Saucats préférant cesser son activité politique sous les règnes de Charles X et de Louis-Philippe. Il meurt en 1835, laissant le souvenir d’un homme honnête et profondément généreux.

A deux kilomètres du bourg environ une petite route qui coupe un immense champ de maïs se termine par un monument : Le Mémorial de la Ferme de Richemont.

Une colonne élancée de 35 m de haut, sur les quatre faces quatre personnages sont sculptés, ils symbolisent La Foi, le Courage, le Sacrifice et la Victoire. La ferme est figurée par quelques pierres en moellons jointées et blanchies formant un muret, un linteau de porte basse et ses deux montants sur lesquels sont gravés un rappel des événements tragiques du 14 juillet 1944 : «... Là ils avaient constitué une école de cadres au service de la Résistance Française, 13 jeunes hommes appartenant à l’élite intellectuelle de la nation tombèrent sous les balles ennemies après trois heures d’un combat héroïque et inégal. C’est pour rappeler ce sacrifice et celui de tous ceux qui sont tombés pour la même cause que le Mémorial a été élevé. »

De l’autre côté du montant les noms des jeunes victimes : « Aniere Lucien, Bouron Jean-Pierre, Bruneau Jean-Claude, Celerier Guy, Dietlin Daniel, Glotz Jacques, Hurteau Roger, Huault Christian, Mosse François, Picon Michel, Rouin Jacques, Sabate Roger, Taillefer André. » Une majorité d’entre eux étaient élèves ou anciens élèves du lycée Michel Montaigne de Bordeaux, le plus jeune avait 17 ans, le plus âgé 23 ans, ils avaient choisi comme devise « Mon âme est à Dieu, mon corps est à la France, mon honneur est à moi ». On retrouva cette devise dans les décombres, écrite sur la page d’un livre appartenant à Jacques Rouin. Un hommage et une inhumation officiels ont eu lieu le 21 avril 1945, les jeunes héros reposent à Bordeaux au cimetière de la Chartreuse .

Le Mémorial a été conçu par Méry-Riboulet, les sculptures sont de Armande Marty.

C’est en revenant de Richemont à l’entrée de Saucats sur notre gauche que nous avons remarqué une ancienne croix de bois avec un crucifix, Saucats ne possède apparemment pas beaucoup de croix de mission, si nombreuses dans d’autres communes voisines.

Pour se rendre au château de Laguloup en venant du bourg il faut traverser le Saucats, un joli petit pont de fer en dos d’âne est visible sur notre gauche, mais le château étant propriété privée nous ne nous autorisons pas à passer.

L’église Saint Pierre, entourée du cimetière, est en forme de croix latine. C’est une église romane presque entièrement restaurée au XIXe siècle mais qui a conservé de l’époque ancienne quelques belles pièces sculptées en haut du chevet, sur l’une d’elles on reconnaît une croix de Malte . Le bâtiment semble en bon état sauf quelques traces d’humidité sur le bas des murs où du ciment s’écaille un peu et des lézardes au-dessus de la petite porte, rien de grave apparemment . Les vitraux sont non figuratifs, motifs de chevrons ou de damiers hormis celui de la petite chapelle de droite représentant le roi Saint Louis et celui de la chapelle de la Vierge représentant Saint André, nous n’avons pas vu de signature . Notre attention est attirée par le chemin de croix peint à l’huile sur toile, d’une belle facture . Il y a aussi un tableau représentant une Mise au Tombeau, là encore aucune signature n’est visible. Dans le chœur une fresque murale signée JERRAL - 1897 est peinte sur plâtre, cette fresque est encadrée de deux macarons représentant les clefs entrecroisées de Saint Pierre. Au-dessus de l’autel nous remarquons un beau retable du XVIIIe siècle, sans doute classé, les parties peintes sont encadrées par deux colonnes torsadées, de chaque côté se trouvent les statues de Saint Pierre (à gauche) et de Saint Paul (à droite). L’autel est un coffrage de bois et plâtre imitant le marbre. Quand on remonte la nef on remarque à l’angle de l’aile gauche l’emplacement de l’ancienne chaire, les marches du petit escalier sont toujours en place. L’autel de cette aile gauche est dédié à la Vierge, on y voit une jolie Vierge à l’Enfant, l’autel latéral droit est dédié à l’Archange Saint Michel représenté par une belle statue en plâtre doré. Les plafonds de ces deux chapelles latérales ainsi que celui du chœur ont conservé leur ancienne peinture bleu étoilé alors que celui de la nef est simplement blanc.

Saucats peut s’enorgueillir de posséder un patrimoine bien particulier, nous voulons parler de l’élatine brochonii Clavaud.(photo ci- dessus).

Ce n’est rien d’autre qu’une fleur mais pas n’importe laquelle, celle ci intéresse grandement les botanistes qui viennent du monde entier pour l’étudier car elle est en voie de disparition et est devenue rarissime. L’élatine pousse uniquement sur les rives des deux étangs de Lagune Longue et de Lagune Ronde, les biotopes constitués par ces deux lagunes sont les derniers en France où pousse cette fleur qui est une espèce protégée et par arrêté du 20/01/82 c’est tout le site naturel qui est protégé, toutes constructions sont interdites à moins de 30m des rives des lagunes. Cette fleur des marais a une autre particularité, elle fleurit très rarement et rares sont les Saucatais qui peuvent se flatter de l’avoir vue. A notre immense regret non seulement nous ne l’avons pas vue, mais nous n’avons pas pu apprendre autre chose sur cette fleur si rare : aucun croquis, aucune photographie ni simple indication de sa forme, taille, couleur ou rythme de floraison.

Le patrimoine Saucatais possède une autre richesse importante et passionnante, c’est la Réserve Géologique. Il s’agit d’une association loi 1901 fondée en 1982 dans le but de protéger, faire connaître et permettre d’étudier un site géologique particulièrement riche, des salles d’exposition sont aménagées dans des locaux municipaux, il y a également une visite sur site suivant un itinéraire balisé dont le point de départ est au carrefour de la D 108 et de la D 111, vers leMoulin de Bernachon et l’Ariey. Cette Réserve a permis de créer quelques emplois à mi-temps. Le musée reçoit quotidiennement la visite des écoliers, pour les plus jeunes c’est la salle de droite où une « vitrine-gag » les accueille, on y trouve, en fait de fossiles, un Schtroumph, un paquet de Palmito et la photo du boulanger de Saucats ! A la vitrine suivante les choses sérieuses commencent : dans des bassines pleines de sable ou de graviers semblables au sol du site où ils ont été découverts sont exposés coraux et fossiles. La salle de gauche est réservée aux collégiens et aux adultes, elle est équipée de microscopes avec lesquels on peut à loisir examiner coraux et coquillages fossilisés, les admirer et s’émerveiller devant leur beauté... On y resterait des heures si on pouvait... Ce site a été découvert en 1850, la plupart de ces fossiles proviennent de l’ère tertiaire, environ 21 millions d’années avant notre ère. A Saucats deux niveaux sont surtout représentés : l’Aquitanien et le Burdigalien, à cette époque la mer recouvrait les lieux. En fait il y eut plusieurs invasions marines qui ont entraîné des changements climatiques donc on trouve des fossiles différents mais l’ensemble prouve que le climat dans son ensemble était alors plutôt équatorial. Un joli coquillage a été choisi comme emblème de la Réserve, il répond au non moins joli nom de Melongena lainéi et il a vécu très peu, seulement de moins 23 à moins 20,8 millions d’années c’est à dire presque rien à l’échelle géologique, il ne faut pas oublier que la Terre à 4 milliards d’années et l’homme à peine 2 millions nous rappelle notre guide ! Un voyage aux pays des fossiles et des coraux peut être passionnant, il ne faut pas hésiter à s’y rendre :

(17, chemin de l’église à Saucats,Tel.05.56.72.27.98).

Il faut tout de même préciser qu’une petite partie du territoire de la Réserve est situé sur la commune de La Brède.

La principale activité économique de Saucats vient de l’exploitation de la forêt, il y a peu de vignes.

L’aérodrome de Léognan possède environ 200 m de piste sur la commune de Saucats. Pour l’avenir on peut facilement envisager un aménagement de sentiers de randonnées, le site naturel avec ses hectares de pins et ses lagunes s’y prête facilement. A Saucats comme dans beaucoup de communes rurales le rôle des associations est important pour maintenir l’activité et la vie du village, le Comité des Fêtes organise la fête communale qui a lieu pour la Saint Pierre à la fin du mois de juin, la part culturelle, outre la Réserve géologique, est représentée par une école de danse et une troupe de théâtre « Les styles aux billes », qui organise des soirées théâtrales, un Atelier Théâtre enfants, l’USCS qui regroupe de nombreuses activités sportives : athlétisme, football, gymnastique volontaire, tennis, Ky-Do etc...

A-M et J-C CARON

 

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